Canalblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Publicité
* 0BJECTION 007 *
5 décembre 2013

MEXIQUE : LE STUPEFIANT SOUS-COMMANDANT MARCOS !

Nous sommes le 22 décembre 2012, les regards du monde entier se tournent vers le territoire Maya. Une centaine de touristes et des médias venus de tous les coins de la planète attendent l’accomplissement d’une prophétie millénaire : l’Apocalypse de l’Ere moderne. Déception : rien d’extraordinaire ne se produit ! Là où il se produit quelque chose, en revanche, c'est au cœur de la montagne du Chiapas où un défilé d’hommes et de femmes masqués marchent sous la pluie et traversent cinq villes. L’E.Z.L.N. (Armée zapatiste de Libération nationale) occupe l’espace public en silence, mais avec détermination. C’est l’annonce d’une nouvelle étape. Au seuil du 20e anniversaire de l'irruption del’E.Z.L.N., le moment était bien choisi pour rendre un hommage à la mémoire de tant d'années de lutte.

" L’EZLN en rétrospective : Une lutte pour la reconnaissance des peuples indigènes" 

 "Vous avez entendu / C’est le bruit de votre monde qui s’écroule. / C’est celui du notre qui resurgit. / Le jour où le jour fut, c’était la nuit. / Et ce sera la nuit le jour où ce sera le jour./ DÉMOCRATIE ! /  LIBERTÉ ! / JUSTICE  "

Le Sous Commandant Insurgé Marcos

443816-544250

Le 1er janvier 1994, le Mexique s’est réveillé convulsionné par les medias. Des images d’hommes anonymes et armés inondaient les écrans de télévision. Les rebelles avaient pris les chefs-lieux de cinq communautés et envoyaient par là-même une déclaration de guerre contre l’Etat mexicain, le jour de l’entrée en vigueur de l'Accord de libre-échange nord-américain".

Ça suffit !

C’était la clameur des indigènes qui demandaient la démission du Président de la République Mexicaine, Carlos Salinas de Gortari, en le déclarant illégitime. Ils dénonçaient aussi la dictature du PRI (Parti Révolutionnaire Institutionnel) qui était au pouvoir depuis soixante-dix ans. Ils revendiquaient ainsi sa lutte pour le travail, la terre, un toit, l’éducation, l’alimentation, la santé, l’indépendance, la liberté, la démocratie, la justice et la paix. Et ils criaient sa colère contre l’injustice, contre les politiques imposées par les grands pouvoirs économiques, contre le néolibéralisme. C'était le début d’une lutte pour les droits et la reconnaissance des peuples indigènes. Le coup d'envoie d'une grande lutte aux yeux du monde entier.

Nous sommes tous Marcos !

Au milieu du conflit et de ces luttes, la figure du sous commandant Marcos prend une importance fondamentale. Il devient non seulement le porte-parole de la rébellion, mais également un icône du mouvement. Il s’approprie l’espace public à travers un discours incendiaire et passionné. Bientôt il sera la voix des causes d’une société exaspérée et déçue par les anciennes pratiques politiques et des politiciens. Face aux questionnements sur l’identité de Marcos, il se désignera lui-même comme le représentant de tous ceux qui ont été marginalisés par la société. "Nous sommes tous Marcos", affirmera-t-il dans un de ses discours, donnant une identité à un mouvement que l'on appelera "zapatiste".

Le 9 février 1995, alors que le gouvernement mexicain menait des négociations pour la paix avec l’E.Z.L.N., le chef du pouvoir judiciaire annonçait aux médias la découverte de l’identité des principaux chefs de la rébellion zapatiste et, en même temps, ordonnait leur arrestation immédiate pour terrorisme.

Le sous-commandant Marcos a été ainsi identifié comme Alfonso Guillén Vicente, un ancien professeur de philosophie de l’Université Autonome Métropolitaine à Mexico, fils d’une famille aisée d’origine espagnole habitant le nord du pays. Il convient de souligner que ces révélations n’ont jamais été confirmées par Marcos, ni par sa famille.

De cette manière, loin d'affaiblir et de stigmatiser le leader des zapatistes, cette version officielle a contribué à l’idéalisation du Sous-commandant Marcos. Il devenait ainsi le héros romantique, l’homme blanc qui a décidé d'abandonner sa position sociale, sa famille, sa vie, pour combattre dans la jungle aux côtés des indigènes poursuivant leurs idéaux. Il évoquait dans l’imaginaire populaire les anciens héros révolutionnaires : Francisco Villa, Emiliano Zapata, le « Che » Guevara, Augusto Sandino, entre autres. Et cela se vit lors des grands manifestations de soutien pour l’E.Z.L.N. à travers le pays. A l'occasion de celles-ci, la population trouvait l’opportunité d'exprimer son mécontentement contre la crise économique, l’autoritarisme et la dictature d'un parti officiel faussement démocratique. « Nous sommes tous Marcos » se mit à proclamer la société civile du sud au nord et de l'est à l'ouest du pays.

La trahison de l’État mexicain

Après les premiers affrontements entre l’armée mexicaine et l’E.Z.L.N, justifiés par le gouvernement comme une lutte contre le terrorisme, ce dernier finit par établir un dialogue avec les zapatistes. Pressé par la société civile, les médias internationaux et la proximité de l’élection présidentielle, le gouvernement entame des négociations qui aboutiront à la signature des « Accords de San Andrés Larrainzar » en 1996, par lesquels l’État reconnaît les droits et l’autonomie des peuples indigènes et s’engage en outre à répondre aux demandes de justice et d’égalité des indigènes et des populations les plus pauvres.  

Les choses auraient pu en rester là, mais le gouvernement a joué double-jeu, au point que les accords ne sont pas ratifiés par le pouvoir législatif. Devant cette première trahison de l’État mexicain, l’E.Z.L.N. entame sa résistance au milieu de la montagne en établissant des liens avec un grand nombre d'organisations de résitance nationales et internationales. Les années suivantes, alors que les négociations sont stériles, les zapatistes seront l’objet de la persécution et du harcèlement de l’armée régulière mexicaine et de groupes paramilitaires. Un événement représentatif de cette situation a été le massacre d’Acteal où 45 « tzotziles », sympathisants de l’EZLN, ont été assassinés, la plupart étaient des enfants et des femmes.

Un commencement de transition démocratique se produit au Mexique en 2.000. Le triomphe de Vicente Fox, candidat de la droite, le Parti action nationale (PAN), marque le début d’une nouvelle étape du pays en renouvelant les attentes de la population et aussi celles du mouvement zapatiste, attendu que, lors de la campagne, Vicente Fox, le candidat devenu président, s’était engagé pour la résolution du conflit.

La grande marche pour les droits des indigènes

Le mouvement zapatiste ne reste pas les bras croisés. Marcos et les siens décident d'organiser une marche à travers tout le pays pour proclamer leurs exigences et rassembler l'ensemble de la société mexicaine autour de l’approbation de la « loi sur les droits et la culture indigène ». C'est le 11 mars 2.001 que la Grande Marche atteint la place principale de la capitale mexicaine, où 200.000 personnes les attendent pour leurs apporter le soutien nécessaire face au pouvoir législatif. Sept jours plus tard, les indigènes accèdent à la tribune de la Chambre de Députés pour exprimer les raisons de leur lutte. Le moment est glorieux, l'E.Z.L.N. triomphe, toutes ces années de lutte n'ont pas été vaines.... Enfin, le 1er août le sénat adopte une loi qui semble mettre fin aux confrontations nées dans le Chiapas. Hélas, cette loi s'avèrera insuffisante. Amendée par le président Fox, elle finit par s'éloigner des accords singés lors des négociations. Le président et ses amis s’étaient bien moquée des zapatistes.

Une lutte inachevée

Meurtri par cette tricherie, l’E.Z.L.N. décide de garder le silence au milieu de la forêt Lacandona où il crée des gouvernements autonomes régis par les mœurs des peuples indigènes, lesquels sont connus comme les « Caracoles ». Cette décision signe l'intention des insurgés de déposer les armes et la lutte armée, mais de poursuivre la lutte par l'action politique. 

En 2006, au beau milieu de la campagne électorale, les voilà qui sortent à nouveau de leur montagne pour exprimer leur désaccord avec les grands partis politiques et leur façon de gouverner en s’opposant à la signature du Pacte de Chapultepec. Cet accord, promu pour l’homme le plus riche de la planète, Carlos Slim, a été signé par la plupart des candidats aspirants à la Présidence de la République. De cette manière, les zapatistes en appelaient à ceux qui « depuis le bas et à gauche » voulaient changer la nation et le monde.

Mais le combat continue

Ecartés de la scène politique, le mouvement zapatiste continue malgré tout la lutte depuis les « Caracoles ». En début d’année, après la marche du silence de décembre, ils ont annoncé la création d'un Ecole Zapatiste, destinée à partager les leçons tirées de toutes ces années en résistance avec les diverses organisations sociales . Actuellement, selon les militants zapatistes, ces communautés, qui ne reçoivent aucune aide de l’État, ont développé des projets de production durables ainsi que les institutions nécessaires pour satisfaire les besoins basiques de la population, tels que l’éducation, la santé, la sécurité et la solution de conflits.

Après 20 ans de résistance, les zapatistes continuent ainsi une lutte silencieuse, à l'écart des projecteurs et de la scène médiatique mondiale, ignorés par les médias internationaux et de ceux qui soutenaient naguère leur combat. "C’est une lutte à long terme, a affirmé Marcos. "Le mouvement échoué et Marcos était un opportuniste", répondent ses critiques. Rien n'est certain ni définitif. Il faudra suivre le cours de l’histoire pour savoir le fin mot de l'histoire, sans oublier que, malgré leurs échecs ou leurs réussites,  les zapatistes ont contribué à la construction du Mexique contemporain.

Par Julio MEZA

 

 

Publicité
Publicité
Commentaires
* 0BJECTION 007 *
Publicité
Archives
Newsletter
Publicité